Opinion publiée dans La Presse du 26 août 2023
Crise du logement
Monsieur Trudeau, faites comme votre père !
par Robert Pilon, coordonnateur de la Fédération des locataires d'habitation à loyer modique du Québec
Réunis à Charlottetown, les libéraux fédéraux se demandent comment résoudre la crise du logement. C’est une question très, très, très complexe selon eux.
Lors de la précédente grande crise du logement au Canada, au sortir de la Deuxième Guerre mondiale, le gouvernement n’avait pas hésité à lancer un vaste programme de construction de logements publics en collaboration avec les provinces et les municipalités. Grâce à ce programme, dans les années 1980, sous Pierre Elliott Trudeau et Robert Bourassa, il se réalisait 10 000 logements sociaux par année au Québec, dont 5000 HLM construits directement par la Société d’habitation du Québec (SHQ).
Il n’existerait pas de crise du logement aujourd’hui si ce programme n’avait pas été supprimé, en 1994, par Brian Mulroney du Parti conservateur.
Ce sont 300 000 logements à prix modique de plus qui seraient disponibles pour les ménages au Québec en 2023. Ce parc sans but lucratif contribuerait à maintenir un taux de vacance salutaire qui concurrencerait les appétits démesurés du marché locatif privé.
À ceux et celles qui pourraient penser que les HLM sont une formule dépassée, une étude réalisée1 en avril 2023 par la firme Aviseo Conseil pour le compte du Regroupement des offices d’habitation du Québec concluait sur le plan social que la construction de 12 500 nouvelles unités de logement social permettrait de réduire le taux de pauvreté de 0,8 point de pourcentage et mènerait à des gains de productivité de 14 millions de dollars en santé par une diminution de l’insécurité alimentaire et de la prévalence du diabète, à des coûts évités de 525 millions associés à la diminution de la criminalité et à une augmentation des revenus des ménages de 844 millions à 1600 millions.
Sur le plan économique, l’étude rapportait qu’un investissement de 2,5 à 5 milliards de dollars permettrait de générer des revenus fiscaux de 850 à 1670 millions pour l’ensemble des ordres de gouvernement. Cela signifie que, pour chaque dollar public dans les logements sociaux, le coût réel pour les gouvernements n’est que de 0,66 $.
La solution au manque de logement à bas loyer est donc sous nos yeux et archiconnue. Il suffit de mettre en place un nouveau programme de logement public à Ottawa et d’en confier la maîtrise d’œuvre au Québec.
1. Consultez l’étude « Impacts économiques et sociaux des investissements en logements sociaux »