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La SHQ impuissante devant la démolition de HLM

Soumis par Rédaction le

Fait sans précédent au Québec, 32 logements HLM sont tombés sous le pic des démolisseurs le 22 mars dernier.

Selon un reportage de Radio-Canada, « les immeubles à logement étaient en état de délabrement depuis 2010, lorsque tous les locataires de l’endroit avaient été expulsés. Les fenêtres avaient depuis été placardées, ce qui donnait des allures de ville fantôme au secteur.

La municipalité de Daveluyville a finalement réussi à racheter les terrains où se trouvent ces immeubles en septembre dernier, après de nombreuses discussions avec le gouvernement fédéral. La Ville a conclu qu’il était plus rentable de vendre les terrains à des entrepreneurs plutôt que d’assumer la reconstruction des immeubles. Le promoteur prévoit la construction de cinq immeubles de six logements ainsi que de plusieurs maisons unifamiliales ou jumelées. »

Comment a-t-on pu en arriver là ?

En vertu de la Loi sur l’accès à l’information, la FLHLMQ a obtenu copie d’une lettre que la SCHL a adressée à la SHQ le 28 août 2015.

« Suite à votre recommandation datée du 23 juillet 2015, la SCHL autorise la vente des huit immeubles de l'ensemble immobilier # 1003 dans leur état actuel en faveur de la Ville de Daveluyville pour une valeur marchande symbolique de 1,00 $. Ce qui entraînera le retrait de 32 unités de logement social du portefeuille fédéral-provincial. »

Pourquoi la SHQ a-t-elle acceptée de formuler une telle demande à la SCHL ? Dans un mémoire qu’elle adressait à la SCHL, le 23 juillet 2015, la SHQ écrit que :

« En 2004, divers problèmes d'humidité sont apparus en raison d'une ventilation déficiente du vide sanitaire. Les problèmes d'humidité se sont accentués au cours de l'année 2007, causant des maux de tête, des problèmes respiratoires, des étourdissements et des rhumes à plusieurs locataires. L'Office a alors jugé ces situations assez préoccupantes pour requérir une étude auprès de la firme Airmax Environnement inc. sur la qualité de l'air. Cette étude a été réalisée le 26 juin 2008.

Depuis le dépôt du rapport, la situation de contamination s'est dégradée à un point tel que l'ensemble des 32 logements est infecté. Les conclusions du rapport et la dégradation de la contamination ont incité l'Office à procéder au transfert progressif des locataires vers d'autres logements.

Selon les prétentions du maire, les huit immeubles ne sont d'aucune utilité et s'avèrent une nuisance au développement de la Ville qui figure parmi les municipalités les plus dévitalisées au Québec. Pour une population de 966 habitants, il y a 120 HLM, soit un ratio de 12,4 %. Il n'y a pas assez de clientèle sur le territoire pour combler ces logements. La directrice de l'Office doit maintenant accepter des demandes provenant de l'extérieur, allant même jusqu'à Victoriaville et Drummondville. Par contre, le maire mentionne que seuls les habitants de la Ville contribuent au maintien de ces immeubles par leur compte de taxes. »

Plusieurs échanges ont eu lieu entre la Ville et la Société afin de trouver un scénario acceptable pour les parties. »  La solution acceptable s’est avérée être le pic des démolisseurs et la perte de 32 unités de logement social.

Comment est-il possible qu’on ait laissé aller à l’abandon des immeubles alors que la SHQ dispose, depuis 2007, des budgets suffisants pour procéder aux travaux majeurs et que le nombre de logements HLM non occupés à Daveluyville était seulement de 2 ou 3 par année ?

L’attitude hostile du maire qui considérait que les HLM constituent une nuisance au développement de la ville et qui trouvait choquant de loger des pauvres en provenance de Victoriaville ou de Drummondville explique, en grande partie, pourquoi l’office a refusé de faire les travaux nécessaires de 2008 à aujourd’hui avec les conséquences désastreuses que l’on connait.

L’intransigeance de la SCHL dans sa gestion des ententes fédérales-provinciales est aussi responsable de la perte définitive des 32 unités subventionnées selon l’explication donnée par le journal La Nouvelle, du 14 juillet 2010, qui écrivait que « la SCHL a refusé le projet déposé par l’Office municipal d’habitation de Victoriaville-Warwick à l’effet de récupérer les 32 subventions perdues à Daveluyville. »

Un scandale qui ne doit pas se répéter !

L’acteur principal dans cette saga de près de 10 ans demeure toutefois la Société d’habitation du Québec qui était, rappelons-le, propriétaire des immeubles HLM qui ont été vendus à la ville avec l’accord de la SCHL.

On sait pourtant que dans d’autres cas – les habitations Val-Martin à Laval ou Adélard-Dugré à Trois-Rivières par exemple – la SHQ a consenti l’investissement de nombreux millions dans la régénération en profondeur d’immeubles délabrés en collaboration avec l’office et la municipalité concernés. Or pourquoi, à Daveluyville, la SHQ n’a-t-elle pas forcé la tenue des travaux pour empêcher la détérioration des 8 immeubles ? Est-ce en raison des pressions politiques ou de la peur d’affronter un maire militant ouvertement pour la démolition des HLM ? Faut-il comprendre que ce sont les aléas de la politique municipale qui décident de l’avenir du parc de logement social au Québec ?

Lors d’une rencontre avec la PDG de la SHQ, Guylaine Marcoux, le 1er mai, celle-ci nous a indiqué que la SHQ regrettait beaucoup la perte des unités à Daveluyville et que c’est pourquoi elle avait cru bon demander de nouveaux pouvoirs au gouvernement pour éviter qu’une telle histoire ne se répète. Ainsi, avec l’adoption, en 2017, du projet de loi 83, la loi de la SHQ a été amendée pour inclure l’article suivant :

« 68.14. La Société peut exiger que des travaux majeurs de réparation ou d’amélioration relativement à des immeubles d’habitation à loyer modique soient effectués dans le délai qu’elle détermine, en transmettant un avis à l’organisme responsable de l’exploitation. L’organisme a 15 jours suivant la réception de cet avis pour informer la Société qu’il s’engage à effectuer la totalité des travaux exigés dans le délai imparti ou, à défaut, pour présenter par écrit ses observations. Si l’engagement requis n’est pas reçu dans le délai imparti, la Société peut désigner une personne pour gérer ces travaux, en totalité ou en partie, pour et au nom de cet organisme et aux frais de ce dernier. »

Nous comprenons donc que la SHQ s’est donné les moyens légaux de contraindre les villes à ne pas saboter les efforts de rénovations des HLM.  Mais qu’en sera-t-il de la volonté politique de se servir ou non de ce pouvoir ?  

La démolition de 32 logements HLM est un précédent scandaleux au Québec.  La FLHLMQ profitera des élections au Québec pour le rappeler et demander aux partis politiques de prendre l’engagement public que cela ne se reproduise jamais plus.